2025 · IL NE FAUT JURER DE RIEN

ÉRIC VIGNER créé Il ne faut jurer de rien dans le cadre du Centre de Recherche et de Création Théâtrale de Pau (CRCTP) en janvier 2025 avec ESTHER ARMENGOL, LUCILLE OSCAR CAMUS, STÉPHANE DELILE, ESTHER LEFRANC, PAOLO MALASSIS et NATHAN MOREIRA.

"Il ne faut jurer de rien est une comédie-proverbe d'ALFRED DE MUSSET, écrite en 1836, et présentée pour la première fois en 1848 au Théâtre de la République (Théâtre Français). Elle fait suite à On ne badine pas avec l'amour écrite en 1834. Les deux pièces se répondent et ne proposent pas la même fin. À la brutalité de la dernière réplique de Camille "Elle est morte. Adieu Perdican." MUSSET fait dire à Valentin à la fin de la pièce, dans uns scène qui n'est pas sans évoquer l'univers de MAETERLINCK avant l'heure "...je t'aime, je t'épouse, il n'y a de vrai au monde que de déraisonner d'amour." et conclut qu'"il ne faut jurer de rien, et encore moins défier personne." MUSSET propose donc une résolution heureuse aux atermoiements d'un jeune homme qui ne veut pas se marier de peur d'être trahi. La vérité de l'amour de Cécile lui parvient, et celui qui voulait "mourir d'aimer" dans un idéal romanesque vécu dans un monde de fiction accepte tout simplement d'aimer et de vivre dans la réalité un amour réciproque. L’amour et la vérité sont proposés par ALFRED DE MUSSET comme les valeurs sur lesquelles un avenir peut se construire. C’est une des raisons pour lesquelles, j’ai choisi de mettre en scène cette comédie-proverbe pour six jeunes actrices et acteurs."
ÉRIC VIGNER

"Il ne faut jurer de rien est l’une des pièces les plus folles et les plus réussies de MUSSET. Sur le plan dramaturgique, le jeu avec les espaces (chambre, château, jardin) lui confère une grande mobilité. Les dialogues rivalisent de drôlerie et les situations de cocasserie, jusqu’à ce que la révélation de l’amour introduise un autre tempo et un autre langage : alors se déploie le lyrisme de MUSSET, dans ce qu’il a de plus intense et de plus pur. Cette rencontre entre la comédie et la poésie fait de la pièce l’une des comédies les plus réussies du répertoire romantique. On ne s’étonnera pas qu’ALEXANDRE DUMAS appréciait beaucoup cette pièce héroï-comique et poétique. Aux côtés des chefs-d’œuvre de SHAKESPEARE et de SCHILLER, il l’inscrivit au répertoire de son Théâtre-Historique, où elle fut créée en juin 1848."
SYLVAIN LEDDA

VALENTIN
Pourquoi ce ciel immense n'est-il pas immobile ? Dis-moi ; s'il y a jamais eu un moment où tout fut créé, en vertu de quelle force ont-ils commencé à se mouvoir, ces mondes qui ne s'arrêteront jamais ?
CÉCILE
Par l'éternelle pensée.
VALENTIN
Par l'éternel amour. La main qui les suspend dans l'espace n'a écrit qu'un mot en lettre de feu. Ils vivent parce qu'ils se cherchent, et les soleils tomberaient en poussière, si l'un d'entre eux cessait d'aimer.
[1]

" ... Je ne vois pas l'écrivain écrire pour tenter d'établir une communication par le livre avec les autres hommes, je le vois en proie à lui-même, dans ces lieux mouvants limitrophes de ceux de la passion, impossible à cerner, à voir, et dont rien ne peut le délivrer. On est là au bout du monde, au bout de soi, dans un dépaysement incessant, dans une approche constante qui n'atteint pas. Car là on n'atteint rien de même que dans l'invivable du désir et de la passion. Le malheur merveilleux, c'est peut-être cette torture-là."[2]
MARGUERITE DURAS

"Avez-vous lu Jocelyn?"[3]

"Ne maudissez pas tant la vie et l’homme ! Sans doute il y a de tristes dégradations ; il y a des âmes qui se lassent et qui tombent pour se relever ; il y en a qui tombent pour toujours ; il y en a qui se vautrent dans la servilité et dans la corruption ; mais à mesure qu’il en disparaît une, il en surgit dix autres pleines de sève et toutes en fleurs, pour purifier et rajeunir l’air vital que nous avons toujours à respirer. Sans cela l’homme mourrait, et il doit vivre. Celui qui désespère des hommes ne connaît pas Dieu ; car, dans les temps de lumière, il s’appelle Foi : et, dans les temps de ténèbres, il s’appelle Espérance."[4]
LAMARTINE

Clarisse Harlove & Lovelace [5]

"ALFRED DE MUSSET aimait particulièrement et relisait sans cesse le beau roman de RICHARDSON ; il fut attiré par le titre du drame, et il se prit d'une telle admiration pour l'actrice et d'un tel goût pour la pièce, qu'il suivit assidûment les représentations du Gymnase pendant trente soirées consécutives."[6]
PAUL MUSSET

"Il suffit de considérer que RICHARDSON n'a pas voulu d'abord écrire un roman épistolaire et choisi ensuite de donner à ses personnages un goût pour l'écriture qui justifie leur pratique intense, mais plutôt qu'il voulait mettre en scène diverses façons d'aborder l'écriture, à travers divers personnages qui croient, chacun à sa manière, en son pouvoir, et que le roman épistolaire était le véhicule adéquat à ce projet : « Nous ne quittons pas la plume, la belle Clarisse et moi. Jamais deux amants n'eurent tant de goût pour l'écriture », écrit Lovelace. Et il poursuit : « jamais il n'y en eut, peut-être, qui aient eu tant d'intérêt à se cacher mutuellement ce qu'ils écrivent »."[7]
SHELLY CHARLES

La rencontre entre ÉRIC VIGNER et la promotion 11 (et plus particulièrement avec les six actrices et acteurs choisis pour la distribution) s’est faite lors d’un stage à l’École du TNB en février 2022. Pour cette occasion, ÉRIC VIGNER a souhaité revenir sur une pièce marquante de son parcours d’acteur et de metteur en scène, La Place Royale de CORNEILLE, la première pièce qu’il a montée lorsqu’il était en formation au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique à Paris, puis recréée dans le cadre de L’Académie internationale de Théâtre qu’il avait mise en place de 2010 en 2013 à Lorient où il était directeur du CDDB - Centre Dramatique National de Lorient.

[1] ALDRED DE MUSSET, Il ne faut jurer de rien, 1836, Acte III, scène IV
[2] MARGUERITE DURAS, Les yeux verts, Cahiers du Cinéma, 312/313, 1980
[3] ALDRED DE MUSSET, Il ne faut jurer de rien, 1836, Acte I, scène II
[4] LAMARTINE, Jocelyn, Post-scriptum des nouvelles éditions, 1840
[5] SAMUEL RICHARDSON, Clarissa, or the History of a Young Lady, roman épistolaire publié à Londres en 1748 et traduit en français par l'abbé Prévost en 1751. Parmi ses personnages figure Lovelace, figure emblématique de la littérature.
[6] PAUL MUSSET, Biographie d’Alfred de Musset, 1877
[7] SHELLY CHARLES, Présentation Histoire de Clarisse Harlove, Volume I., Éditions Desjonquères, 1999

© Photographies : Jean-Michel Ducasse
Textes assemblés par Jutta Johanna Weiss