Le Nouvel Observateur · 30 mai 1996 · L'ILLUSION COMIQUE

Le Nouvel Observateur · 30 mai 1996 · L'ILLUSION COMIQUE
Une impossible enfance
Presse nationale
Critique
Odile Quirot
30 Mai 1996
Le Nouvel Observateur
Langue: Français
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Le Nouvel Observateur

30 mai 1996 · ODILE QUIROT

Une impossible enfance

Une fabuleuse comédie tout en reflets, l'Illusion comique de Corneille, revisitée par ÉRIC VIGNER

Dans la Pluie d'été de Marguerite Duras qu'ÉRIC VIGNER avait créé en un spectacle sur une crête sensible et légère, le feu, déjà, surgissait. Le même feu brûle dans l'Illusion comique de Corneille qu'ÉRIC VIGNER a créée au Théâtre de Lorient dont il a pris cette année la direction. C'est un spectacle ambitieux, une belle soirée. Un père éploré, parti de Bretagne à la recherche de son fils, va rencontrer un magicien, Matamore, à même enfin de lui dévoiler les aventures passées et présentes de sa progéniture. De jeunes gens vont s'aimer, se jalouser, s'enfuir en de rocambolesques aventures. Il y a, dans l'Illusion, beaucoup déjà des Géants de la montagne de Pirandello. Giorgio Strehler a d'ailleurs  monté les deux pièces en un festival de lumières, de grande magie et d'amour fou pour l'illusion et ses ombres. Le spectacle d'ÉRIC VIGNER est plus sage, moins baroque ; c'est son choix que de camper un Matamore (Grégoire Oestermann) comme un voyageur un peu las. Présent, passé, réalité ou théâtre, tout fait reflet, d'emblée, sur le même plan. ÉRIC VIGNER est jeune encore, ses comédiens aussi. Une lucidité empreinte de tristesse étend son aile sur cette Illusion comique qui s'achève sur le geste lent et doux d'un père, et cet instant fragile porte en lui le meilleur du talent d'ÉRIC VIGNER.