Les Inrockuptibles · 3 octobre 2006 · LE BOURGEOIS GENTILHOMME

Les Inrockuptibles · 3 octobre 2006 · LE BOURGEOIS GENTILHOMME
Le chef-d'œuvre de Molière
Presse nationale
Critique
Fabienne Arvers
03 Oct 2006
Les Inrockuptibles
Langue: Français
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Les Inrockuptibles

3 octobre 2006 · FABIENNE ARVERS

Rencontre avec un surprenant BOURGEOIS GENTILHOMME

Le chef-d'oeuvre de MOLIÈRE transfiguré par les comédiens et les danseurs du Théâtre national de Corée. "Nicole, apporte-moi mes pantoufles ! C'est de la prose !", braille le Bourgeois gentilhomme à sa moitié. On pourrait se croire 'Au théâtre ce soir', mais non, c'est plutôt du côté du Théâtre national de Corée que le metteur en scène ÉRIC VIGNER est allé chercher sa troupe. Une troupe complète comprenant des comédiens, danseurs, chanteurs et musiciens, comme à la belle époque du Roi-Soleil, et qui nous fit retrouver le chemin de l'Opéra-Comique pour une série de représentations du JEU DU KWI-JOK (ou LE BOURGEOIS GENTILHOMME) avant son départ pour Brest. Pas très loin de Lorient, où le roi Louis XIV implanta sa Compagnie des Indes en 1666, ville baptisée L'Orient et qui perdra son apostrophe comme d'autres leur tête, un peu plus tard...

ÉRIC VIGNER nous rappelle encore que LE BOURGEOIS GENTILHOMME fut écrit par MOLIÈRE sur commande du roi pour ridiculiser les Turcs qui avaient osé envoyer un jardinier comme ambassadeur à Versailles. Crime de lèse-majesté impardonnable qui fit le miel de MOLIÈRE, car si la bêtise est sans fond, le ridicule n'a pas de frontières. C'est avec un appétit partagé que la troupe imposante du Théâtre national de Corée et ÉRIC VIGNER se sont penchés sur les bouffonneries de ce bourgeois en mal d'amour et de reconnaissance sociale, assoiffé de culture, qu'il confond avec classe, mais incurablement inapte à obtenir ce qu'il désire. Ridicule de bout en bout, mais plein aux as. Un gros bébé gâté qu'interprète avec brio LEE SANG-JIK, souvent couché sur le dos, pattes en l'air, dans un de ses caprices récurrents qui rythment ses tentatives d'initiation à la musique, la danse, la langue, les armes ou la philosophie. Tout ravit l'oeil, du décor - un paon blanc en forme de cercle peint sur le plateau noir et des pendrillons multipliant le motif des plumes - aux costumes, made in Corée, et bien sûr des comédiens et danseurs aux musiciens et chanteurs : l'humour a revêtu ses plus beaux atours et incarne à merveille cette tirade du Bourgeois gentilhomme: "Sans la science, la vie est presque une image de la mort."