Le Peuple Breton · Novembre 1996 · BRANCUSI

Le Peuple Breton · Novembre 1996 · BRANCUSI
On a encore envie de discuter du sujet.
Presse régionale
Critique
Nov 1996
Le Peuple Breton
Langue: Français
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Le Peuple Breton

Novembre 1996

Théâtre: Brancusi contre états-Unis

Le Centre Dramatique de Bretagne, installé à Lorient, vient de présenter une série de séances consacrées à une création, Brancusi contre États-Unis.

Constantin Brancusi était un grand sculpteur roumain installé en France, qui a joué un rôle important dans l'évolution de l'art contemporain jusqu'aux années 50. En 1926, "L'oiseau", une œuvre de l'artiste, est achetée par un musée américain. Les douanes américaines taxent l'objet à 40 %, au prix des produits ordinaires, déniant à la pièce le caractère d'œuvre d'art.

Brancusi fait alors un procès à l'État américain pour faire admettre qu'il s'agit bien d'une œuvre d'art. Le procès a effectivement eu lieu pendant plus d'un an, en 1927 surtout. Ce sont les minutes de ce procès qui ont servi à l'écriture de la pièce.

Le thème est sérieux, intéressant, et pourrait paraître austère. "Brancusi est un artiste, son "oiseau", produit à un seul exemplaire, travaillé de la main de l'artiste, conçu par lui, est une œuvre d'art", affirment les témoins de l'accusation, des sculpteurs, des critiques d'art, des conservateurs de musée. "Cet objet non figuratif ne procure aucune émotion artistique, ce n'est pas une œuvre d'art", répondent les témoins cités par le défendeur, l'État américain.

Pour faire vivre un tel débat, Vigner a placé les spectateurs sur la scène, en amphithéâtre, les plaçant en position de jury. Il a intercalé les neuf comédiens, en costume sobre, les amenant à défendre avec conviction leur point de vue. Le débat de 1926-27 trouve ainsi porté en 1996, avec une actualité vibrante. On suit avec intérêt la fougue et la sincérité des acteurs-témoins, on applaudit leurs conclusions et l'on se trouve prêt, à la fin, à rendre le verdict : le travail de Brancusi est bien une œuvre d'art. L'heure quarante cinq passe vite et l'exploit des comédiens n'est pas mince d'avoir réussi à donner corps et vie à un tel débat. On ne décroche jamais, et, les acteurs partis, on a encore envie de discuter du sujet. Bravo!