Ouest France · 14 Février 2013 · GATES TO INDIA SONG

Ouest France · 14 Février 2013 · GATES TO INDIA SONG
Éric Vigner en voyage de Lorient à l'Orient.
Presse régionale
Avant-papier
Aurélie Dupuy
14 Feb 2013
Ouest France
Langue: Français
Tous droits réservés

Ouest France

14 Février 2013 · Aurélie Dupuy

Éric Vigner emmène Duras en Inde

L'écrivaine Marguerite Duras n'est jamais allée en Inde, Ce pays elle l'a rêvé au travers de son roman Le Vice-Consul, écrit en 1966, puis dans la pièce India song, commandée en 1973 par le National Theater of London. L'histoire d'amour tragique n'a finalement pas été montée sur les planches. lndia song est devenu un film avec Delphine Seyrig et Michael Lonsdale, présenté à Cannes en 1975.

Éric Vigner, directeur du Grand Théâtre de Lorient, a décidé d'explorer à nouveau la voie théâtrale. Il a "synthétisé" les deux écrits originaux pour produire gates to India Song. Cette création sera jouée jusqu'au 13 mars entre Bombay, Calcutta et Delhi, dans le cadre du festival Bonjour India, organisé par l'ambassade de France.

L'aventure orientale du metteur en scène lorientais est née en 2011. L'adaptation en Inde du Barbier de Séville lui a permis d'obtenir une carte blanche pour revenir en 2013... avec Duras. Il y a effectué plusieurs voyages pour choisir les lieux et les acteurs de son épopée.

"Pour l'héroïne, j'ai pensé à Nandita Das, une actrice du cinéma indien indépendant. Une femme charismatique avec une classe naturelle. C'est excitant que cette pièce puisse vivre en Inde et que des acteurs du cru la découvrent." La boucle est bouclée. La pièce de Duras a enfin retrouvé son décor et la langue dans laquelle elle devait être jouée il y a quarante ans, à Londres.

Entretien

Quelle est la génèse de Gates to India Song ?

En 2011, je suis allé à Delhi pour présenter l'adaptation du Barbier de Séville. J'ai rencontré une attachée culturelle de l'ambassade de France en Inde qui m'a proposé d'imaginer une création originale franco-indienne pour le festival culturel Bonjour India en 2013.

J'ai pensé à India Song de Marguerite Duras, une histoire d'amour tragique qui se noue dans les années 30 à Calcutta. INDIA SONG était d'abord une pièce de théâtre destinée à être jouée en langue anglaise. Mais elle n'a jamais été montée. Marguerite Duras en a fait un film présenté au festival de Cannes en 1975. J'ai adapté deux des écrits de l'auteur, le Vice-consul et India Song pour cette production originale qui s'appelle Gates to India Song.

Marguerite Duras a écrit sur l'Inde mais n'y est jamais allée...

Marguerite Duras a passé dix-sept ans à Saigon en Indochine. Mais elle n'est jamais allée en Inde. Elle place cette histoire dans le champ de la littérature. C'est une fiction. Ce qui est très excitant avec ce projet c'est que des acteurs indiens vont reprendre cette histoire pour lui donner une existence de théâtre, en 2013, en Inde.

Combien de temps avez-vous passé dans ce pays ?

J'ai fait trois voyages de deux à trois semaines depuis 2011 pour préparer le spectacle, trouver les lieux, les partenaires et les acteurs.

Sur quels critères avez-vous choisi la distribution ?

Il fallait d'abord trouver l'actrice qui pouvait incarner Anne-Marie Stretter, l'héroïne. J'ai pensé à Nandita Das, une actrice du cinéma indien indépendant, qui a du charisme et une classe naturelle. Autour d'elle, il fallait trouver le vice-consul. J'ai fait des auditions à Delhi lors du dernier repérage et Souhass AHuja s'est détaché. Il est très émouvant, singulier. Il a gardé quelque chose de l'innocence de l'enfance qui convient pour le rôle. Tous les acteurs viennent de différentes parties de l'Inde.

Comment avez-vous choisi les lieux ?

C'était assez évident. À Bombay, j'ai opté pour le théâtre Prithvi, une institution tenue par la famille Kapoor depuis plusieurs générations. À Calcutta, j'ai choisi la cour de la maison de Tagore, qui est maintenant une université. Tagore est un grand poète indien. C'est une sorte de rencontre post-mortem entre Duras et lui. Le dernier lieu est l'ambassade de France de New Delhi.

Que retenez-vous de ce parcours indien ?

C'est une expérience de travail et de vie extrêmement riche entre deux cultures. Il y a toujours dans le monde des gens qui partagent une passion pour l'art du théâtre. Faire du théâtre dans une langue étrangère me permet toujours de comprendre la mienne de façon plus précise. Je retiens les couleurs et les sons de l'Inde rêvée par Marguerite Duras et qui est devenue une réalité grâce à la littérature qu'elle nous a laissée.