Note de travail · Claude Chestier · L'ILLUSION COMIQUE

Note de travail · Claude Chestier · L'ILLUSION COMIQUE
Notes de travail
Propos
Claude Chestier
1995
CDDB-Théâtre de Lorient
Langue: Français
Tous droits réservés

Un rôle ? Un costume ? Un argument ? Un décor ? Rien d'autre que ce qui est là, qu'il faut trouver, mettre au jour.
Jean Frémon

Paradoxe : alors que l'illusion, ailleurs, joue les faux-semblants, dissout la réalité des corps en grains de lumière, efface la chair dans la transparence,

"L'ILLUSION", ici , affirme l'acteur dans sa réalité, lui fait affleurer puis crever l'écran vide de la représentation telle une pâle plaque photographique qui révélerait peu à peu l'image d'un corps jusqu'à en affirmer la présence en deçà de sa surface.

C'est à une naissance que nous assistons, la naissance du théâtre qui se revendique en lui-même et pour lui-même.

Une naissance en dramaturgie : celle des héros de CORNEILLE qui feront le siècle ; une naissance en architecture : celle du théâtre itinérant quittant les espaces ouverts du monde pour de mondaines "grottes" en pierre de taille. On aménage définitivement la salle du jeu de paume du Marais pour la troupe de Montdory qui joue CORNEILLE. On va inaugurer le Palais Cardinal, le premier, édifice à Paris, construit à seule fin d'y faire du théâtre.

Saisissons ce nouvel infini, cette boîte claire, qu'est cette coquille vide ; cette page blanche, que représente un plateau isolé du monde : le froid de tout espace neuf ; le milieu hostile ; la bataille qu'y mènent de vrais individus : des acteurs, pour s'y affirmer, tendre à la présence après avoir usé, effacé, interprété l'environnement lui- même.

Saisissons la beauté, la force de la jeunesse confiante dans un monde qu'elle construit ; l'organisation qu'elle gagne sur le Marais : le terrain abreuvé par les eaux de la Seine sur sa rive droite ; le quartier qui prend ce nom ainsi qu'un des premiers théâtres qui s'y construit ; l'entité sociale ainsi qualifiée un siècle et demi plus tard et dont les jeunes héros de CORNEILLE tentent de s'extraire, quittes à se consumer et à se perdre dans la brillance qu'ils révèlent à force de vouloir l'atteindre. CORNEILLE sera anobli par LOUIS XIII un an après la première écriture de cette "ILLUSION COMIQUE" : en 1637.