L'Événement du Jeudi · 31 octobre 1991 · LA MAISON D'OS

L'Événement du Jeudi · 31 octobre 1991 · LA MAISON D'OS
Une Maison d'os qui ne s'oublie pas
Presse nationale
Critique
Brigitte Salino
31 Oct 1991
L'Événement du Jeudi
Langue: Français
Tous droits réservés

L'événement du jeudi

31 octobre au 6 novembre 1991 · BRIGITTE SALINO

L'Arche du théâtre

Vers 20 heures, il n'y a plus que quelques silhouettes pressées pour traverser l'esplanade de la Défense. Certaines descendent un escalier signalé par des bidons rouges, s'enfoncent sous l'Arche et disparaissent. On les retrouve dans un de ces sous-sols bétonnés qui font du socle de l'Arche un énorme gruyère, où s'agite toute une vie mystérieuse, un rien inquiétante. C'est dans ce monde des profondeurs chères à Luc Besson que se joue la Maison d'os. Ainsi l'a voulu éric Vigner ; il préfère aux théâtres les endroits bruts. "Ce qui m'intéresse, dit-il, c'est de créer de la vie." Et il y arrive, avec une légèreté aux antipodes de la mièvrerie. Sûr que, pour ce garçon de 30 ans, qui a grandi dans un village breton entre un père garagiste et une mère postière, la terre est bleue comme une orange. Dans la Maison d'os, Roland Dubillard parle de la mort, du vide qu'elle laisse dans les maisons, les têtes, les mots. Il le fait à sa manière, celle d'un poète, qu'éric Vigner restitue dans une mise en scène à la fois légère et profonde : la mort est ici vécue comme elle a pu l'être, et l'est encore parfois, là où les gens ont assez de sérénité pour l'inscrire dans le cycle des saisons du temps. Une belle jouissance terrienne anime les sous-sols de béton brut, que les vingt-trois comédiens dirigés par éric Vigner transforment en une Maison d'os qui ne s'oublie pas.