Le Figaro · 23 septembre 1999 · L'ÉCOLE DES FEMMES

Le Figaro · 23 septembre 1999 · L'ÉCOLE DES FEMMES
"Avec ÉRIC VIGNER, on entend le texte d'une autre façon."
Presse nationale
Avant-papier
Marion Thébaud
23 Sep 1999
Le Figaro
Langue: Français
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Le Figaro

23 septembre 1999 · Marion THÉBAUD

BRUNO RAFFAELLI, un Arnolphe contemporain.

Sociétaire depuis un an, il joue L'ÉCOLE DES FEMMES de Molière mis en scène par éric Vigner. L'histoire d'un homme qui se prend pour Dieu.

"Je suis un homme de compromis. À la Comédie- Française, c'est indispensable." Cet homme sage, c'est BRUNO RAFFAELLI, entré dans la Maison en 1995 pour Intrigue et amour de Schiller, mis en scène par Marcel Bluwal, sociétaire depuis un an et qui s'apprête à jouer Arnolphe de L'ÉCOLE DES FEMMES. Mais sa popularité, il la doit à l'ami Philippe Caubère, provençal comme lui, l'ancien complice du Théâtre du Soleil qui l'a rendu célèbre à jamais dans son spectacle, Ariane ou l'âge d'or. Caubère en a fait un personnage de sa célèbre saga. Tyrannisé par Ariane Mouchkine, on le voit de corvée de pluches de pommes de terre à la Cartoucherie."En voilà une qui n'est pas une femme de compromis, se souvient Bruno Raffaelli. C'est un chef de troupe. C'est vrai que je ne me suis pas trop entendu avec elle. Je suis resté six mois dans la troupe. Je suivais en même temps les cours au Conservatoire. J'ai choisi de terminer mes classes."

Conte philosophique

BRUNO RAFFAELLI a du coffre et des jambes, et du haut de son 1,90 m, le plus grand sociétaire de la troupe se plie aux exigences d'éric Vigner qui le dirige dans L'ÉCOLE DES FEMMES de Molière. "Sa conception de la pièce m'intrigue", reconnait-il. C'est un secret de polichinelle que d'avouer les réticences 'd'une partie de la troupe. Nicolas Silberg a rendu son rôle :
"J'ai accepté le rôle d'Arnolphe en connaissance de cause, reprend Bruno Raffaelli, car je suivais les répétitions, étant distribué dans le rôle de Chrysalde, repris aujourd'hui par Jean-Claude Drouot."

Bruno Raffaelll a roulé sa bosse, jouant ici et là. Il est certainement le seul sociétaire à être passé de l'Odéon au Casino de Paris. La raison ?
"Pour jouer Super-Dupont de Jérôme Savary avec lequel il a beaucoup travaillé." Avec le Magic, j'ai fait le tour du monde. Savary est un homme qui a le sens de l'entreprise artistique et avec lequel j'ai appris mon métier d'homme de scène, 'c'est-à-dire, chanter, jouer d'un instrument, danser."

C'est cet homme-là qui a joué Comment va le monde Môssieu ? de François Billetdoux mis en scène par Jean-Pierre Miguel, a fait un triomphe, la saison dernière, dans Les Merdicoles de Michel Albertini qui comme son nom l'indique n'a rien de claudélien, et s'apprête à être un Arnolphe très éloigné de la tradition.

Éric Vigner est un visionnaire. Il ne fait aucune concession, il prend des risques. Je le suis dans cette exigence. Avec lui, on entend le texte d'une autre façon." La comédie devient un conte philosophique. Il n'est plus question d'un barbon et d'une jeune fille, mais d'un homme qui se prend pour Dieu. "Tout se passe dans la tète d'Arnolphe. ll ne souffre pas car il sait que le départ d'Agnès est inéluctable. Il ne peut pas être l'homme de cette femme qu'il a créée."