Ouest France · 17 avril 2003 · SAVANNAH BAY (Comédie-Française)

Ouest France · 17 avril 2003 · SAVANNAH BAY (Comédie-Française)
Des perles de bohème pour évoquer l'univers de Duras à Morlaix
Presse régionale
Critique
17 Avr 2003
Ouest France
Langue: Français
Tous droits réservés

Ouest France

17 avril 2003 · Christine VARESI

Dans les coulisses de Savannah Bay

Des perles de bohème pour évoquer l'univers de Duras. Morlaix.

Ce soir au théâtre de Morlaix, aura lieu la dernière représentation de Savannah Bay avec Catherine Samie et Catherine Hiegel. Pour toutes les personnes qui ont vu la pièce et celles qui la découvriront, retour sur la lumière propre à l'univers asiatique de Marguerite Duras.

Par fragments, le décor a pris possession du théâtre. Chaque élément trouve sa place sur le plateau. Sans tout dévoiler de ce qui doit rester mystérieux, il faudra un peu plus de deux jours aux deux équipes de techniciens pour recréer l'espace. Plus le temps de s'interroger sur la géométrie du spectacle. "Tout a été calé d'avance entre les régisseurs des deux salles, explique Philippe Geffroy, régisseur du plateau. L'acrobatie est d'adapter à chaque scène, un décor qui est prévu pour la Comédie-Française et, de le réduire en conséquence." Un décor qui doit être rendu en l'état : il fait partie du répertoire. Dans ce théâtre à l'italienne, l'architecture imaginaire doit s'adapter aux couleurs baroques rouge et or.

Il est rare que la Comédie Française coproduise des spectacles avec d'autres salles. Le Centre dramatique de Bretagne Théâtre de Lorient a su convaincre la maison de Molière de l'importance d'ouvrir les portes de l'auguste théâtre national à Marguerite Duras. Eric Vigner a imposé sa vision originale de l'univers propre à cette figure de la littérature française. "C'est simple, il me fallait travailler sur les matières qui laissent passer la lumière, celle du Laos où a vécu Marguerite Duras".

La voix de Piaf

Un plancher laqué sur la scène, des chaisès en rotin vieilli pour l'Asie, des verrines colorées pour le côté suranné et, la voix de Piaf, dans le grésillement d'un tourne-disque. Des moucharabiehs qui longent la coulisse à jardin pour filtrer la lumière, "on perçoit l'épaisseur tangible". D'autres éléments jouent l'illusion d'optique : ils sont conçus à partir de photographies qui reproduisent des perspectives et des distances absentes. Et un rideau de perles de bohème disposé entre le public et les deux comédiennes, une sorte d'écran mouvant pour accompagner le texte. Un texte jugé plutôt difficile.

Un manteau ondulant au gré des vagues de la vie, au gré de cette histoire d'amour, de désir, de la douleur et de la joie aussi. Qui doit provoquer des visions de corps et de lumières en mouvement, marquer les silences et les temps jusqu'au vertige. C'est ce rideau de perles fixé sur une patience, elle-même fixée sur une perche, qui au cours de spectacle par un mouvement de contrebalancer rythmera le temps jusqu'au troisième acte... Jusqu'au moment où le rideau tombe.