Libération · 18 novembre 2006 · PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA

Libération · 18 novembre 2006 · PLUIE D'ÉTÉ À HIROSHIMA
Reste l’indéniable subtilité d’une maîtrise scénique attentive à tous les méandres de l’écriture de DURAS.
Presse nationale
Critique
René Solis
18 Nov 2006
Libération
Langue: Français
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Libération

18-19 novembre 2006 · RENÉ SOLIS

ÉRIC VIGNER explore les mots de DURAS

Dans la grande salle du théâtre des Amandiers, ÉRIC VIGNER reprend sa mise ne scène créée au cloître des Carmes durant le dernier Festival d’Avignon : un dispositif ingénieux, avec les spectateurs placés en vis-à-vis d’une scène à la fois surélevée et trouée, ce qui permet aux acteurs des entrées et sorties verticales. Avec PLUIE D’ÉTÉ À HIROSHIMA, le directeur du Centre dramatique de Lorient poursuit son exploration de l’œuvre de MARGUERITE DURAS. En 1993, au théâtre du Conservatoire, il avait présenté LA PLUIE D’ÉTÉ, spectacle fondateur de son aventure théâtrale.

Treize ans plus tard, revoici donc Ernesto, l’enfant illettré qui sait pourtant lire des pages entières de L’ECCLÉSIASTE dans un livre sauvé des flammes. Ernesto vit à Vitry-sur-Seine, dans une famille d’immigrés italiens ou russes – le texte brouille les pistes – et entretient avec sa sœur Jeanne une relation incestueuse, dont on ne saura jamais tout. De ce texte, qui alterne dialogues et séquences narratives, et ressemble dans sa forme à un scénario de film, VIGNER sait faire entendre l’humour et la bizarrerie. Même si, lors de la création à Avignon, le spectacle souffrait de sautes d'intensité, peut-être corrigées depuis.

À LA PLUIE D’ÉTÉ succède, sans entracte, une adaptation de HIROSHIMA MON AMOUR, sous la forme d’un hommage décalé au film. Les deux acteurs (Jutta Johanna Weiss et Atsuro Watabe) sont tels des fantômes d'Emmanuelle Riva et Eiji Olçada; d'autant que la majeure partie de leurs dialogues est dite en voix off. Tout en finesse; leur ballet est aussi extraordinairement contraint, comme si le metteur en scène n'osait pas réinventer la rencontre. Reste l’indéniable subtilité d’une maîtrise scénique attentive à tous les méandres de l’écriture de DURAS.