Les Échos · 15 janvier 2007 · JUSQU'À CE QUE LA MORT NOUS SÉPARE

Les Échos · 15 janvier 2007 · JUSQU'À CE QUE LA MORT NOUS SÉPARE
La douleur, ici, sait rire.
Presse nationale
Critique
Gilles Costaz
15 Jan 2007
Les Échos
Langue: Français
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Les Échos

15 janvier 2007 · GILLES COSTAZ

Trio infernal

Plus que le traditionnel trio du boulevard, la trinité mère, fils et belle-fille est une entité infernale. C'est ce que nous dit l'un des auteurs les plus intéressants du théâtre contemporain, Rémi De Vos, dans Jusqu'à ce que le mort nous sépare. Ni réaliste ni onirique, la pièce se situe de façon originale entre le vrai et le rêvé, la quotidienneté et la folie, la tragédie et le fou rire, là où ce qui ne dit pas finit par exploser. Un homme revient dans son milieu familial pour les obsèques de sa grand-mère. Il est accompagné d'une jeune femme. Il n'a pas vu sa mère depuis longtemps ; celle-ci veut s'emparer à nouveau de lui. Entre ces trois personnages se met en place une danse de vie et de mort tragi-comique, car les cendres de la défunte sont là dans un vase, le récipient va être cassé et les deux jeunes gens vont tenter de cacher le méfait. Sur fond de gags toutes les vérités se disent alors et les rapports évoluent, jusqu'à la provisoire mise au vestiaire des haches de guerre.

Style abstrait

Le spectacle mis en scène et décoré par Éric Vigner est très esthétique. La pièce pourrait se jouer dans des rapports plus étroits et drus. Ici, l'on gomme ce qui serait trop concret ou soulignerait le temps qui passe. Le style est abstrait, ponctué de clins d'oeil, un peu psychanalytique (quelques gestes suggèrent le caractère incestueux de l'amour de la mère pour son fils). C'est discutable mais c'est une mise en scène maîtrisée où les comédiens ont de vraies natures : Catherine Jacob, parfaite en mère possessive et carnassière, Micha Lescot, interprète très singulier que la mise en scène pousse trop vers les pitreries, et Claude Perron, qui est la glace craquante de cette omelette norvégienne. La douleur, ici, sait rire.