Le Provencal · 24 mars 1997 · BRANCUSI

Le Provencal · 24 mars 1997 · BRANCUSI
L'œuvre d'art devant les juges
Presse régionale
Avant-papier
24 Mar 1997
Le Provencal
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Le Provencal

24 mars 1997

L'oeuvre d'art devant les juges

Envoyées à New-York pour une exposition en 1926, les sculptures de l'artiste Constantin BraNcusi avaient été saisies et taxées comme de la marchandise. ÉRIC VIGNER tira du procès une pièce de théâtre. Elle est présentée cette semaine à Martigues

Qui décide qu'un objet est une oeuvre d'art ?
Que celui qui l'a créé est un artiste ?
Eternelle question à propos de laquelle on débattra jusqu'à la fin des temps.

Constantin Brancusi est aujourd'hui considéré comme l'un des sculpteurs les plus importants du XXè siècle. D'origine roumaine mais installé à Paris - son atelier a été reconstitué au centre Pompidou - il expédia à New-York, en octobre 1926, par voie maritime, une vingtaine de sculptures destinées à une exposition de ses oeuvres à la galerie Brummer. L'originalité de la facture de l'artiste, qui a toujours cherché à suggérer, à susciter l'émotion plus qu'à représenter les choses, suscita de la part des autorités douanières américaines une réaction inattendue : les oeuvres furent saisies et taxées comme des marchandises. Le statut d'oeuvre d'art ne leur avait pas été reconnu.

Marcel Duchamp, installé aux Etats-Unis, mobilisa de nombreuses personnalités du monde de l'art afin de provoquer une réaction. Ainsi fut-il décidé d'intenter un procès aux Etats-Unis au cours duquel il serait débattu de la notion d'oeuvre d'art. À quoi la reconnaît-on ? Qu'est-ce qu'un artiste ? Qui décide de ce qui relève ou non de l'art, de ce qui est beau ? Comme pièce à conviction on proposa une sculpture de Brancusi devenue célèbre : L'Oiseau dans l'espace.

Brancusi contre Etats-Unis

Le procès eut lieu en octobre 1927.
Les minutes en ont été conservées. Elles ont été publiées en France en 1995.

ÉRIC VIGNER, plasticien et homme de théâtre, directeur de la Compagnie Suzanne M et du Centre dramatique de Bretagne-Théâtre de Lorient)  a tiré de ces minutes procédurières le texte d'une pièce qu'il a mise en scène, intitulée Brancusi contre Etats-Unis - un procès historique 1928, pièce créée dans la salle du conclave du Palais des Papes, lors du 50è Festival d'Avignon, en 1996.
La pièce fut diversement accueillie. C'est une version remaniée et écourtée à une heure trente que nous propose ÉRIC VIGNER au Théâtre des Salins de Martigues du mardi 25 au jeudi 27 mars.

Le dispositif scénique est original, puisque le public est installé sur la scène même, à droite et à gauche, entourant la pièce à conviction, l'objet symbolique du litige : une reproduction de L'oiseau dans l'espace, les acteurs du procès (juges, procureurs, avocats) intervenant au milieu d'eux. Deux paroles, deux mondes, deux vérités s'affrontent, cherchant un langage commun, sans pouvoir vraiment communiquer.

Une exposition en marge de la représentation

À l'occasion de la présentation de la pièce Brancusi contre Etats- Unis, Le Théâtre des Salins de Martigues accueille dans ses galeries une triple exposition d'Art contemporain intitulée Contemporanéités, à    partir d'oeuvres d'artistes récemment acquises par le Musée Ziem. Ainsi, le débat suscité par la pièce pourra-t-il être prolongé autour des oeuvres de Jean-Paul Marchesi, Akenaton (pseudonyme commun à Philippe Castellin et Jean Torregrosa) et Nicolas Valabrègue.

Vernissage le jeudi 27 mars à 18 heures au Théâtre des Salins suivie d'une rencontre après le spectacle à 21 heures sur le thème " La nécessaire présence de l'Art contemporain " avec les artistes et ÉRIC VIGNER. Exposition ouverte sur place jusqu'au 6 avril.